C’est -20% en 2020 ou le projet Turcot du MTQ. Pas les deux.

Article de Daniel Breton du groupe Maître Chez Nous XXIe siècle (MCN21) que nous remercions chaleureusement.

La semaine dernière, des centaines de citoyens et élus sont allés écouter les représentants du Ministère des Transports présenter la dernière version du projet du futur échangeur Turcot. Cette dernière version très légèrement révisée représente, si le gouvernement va de l’avant avec cette version, le plus important exemple de la vision du gouvernement du Québec en transport, un exemple à $3 milliards.

Après les objectifs de Copenhague et Cancun, l’objectif de Turcot.

À Copenhague en décembre 2009, le premier ministre Jean Charest a annoncé que l’objectif que le Québec visait pour 2020 dans la lutte au réchauffement climatique serait de -20% par rapport à nos émissions de 1990. En décembre dernier, au retour de Cancun, cet objectif a été réitéré par M. Pierre Arcand, ministre de l’environnement.

À la même période, les audiences du BAPE sur le projet du futur projet Turcot avaient lieu. Plusieurs questions importantes y étaient discutées: expropriation de citoyens, pollution atmosphérique, santé des personnes vivant à proximité, urbanisme, etc. Si les commissaires, dans leur rapport, ont essayé d’aider à minimiser les impacts locaux, ils n’ont pas remis en question la hausse du nombre de véhicules qui pourront circuler sur le futur échangeur qui passera de 280,000 à 304,000.

Quel sera l’impact de cette hausse du nombre de véhicules?

Faisons quelques calculs:

Le gouvernement du Canada exige des constructeurs que la consommation moyenne des voitures et camions légers offerts sur la marché voit leur consommation diminuer de 25% en 2016. Par ailleurs, il se passe environ 14 ans avant que le parc entier de véhicules se renouvelle. Considérons donc qu’en 2020, environ le tiers du parc se sera renouvelé et consommera donc potentiellement -25% que le parc pré-2016 pour une baisse d’environ 8%. Mais nous assistons présentement à des ventes records de véhicules énergivores. Le mois dernier, les ventes de camions légers ont augmenté de 13,2 % tandis que celles de voitures ont reculé de 9%.

De plus, si on regarde la hausse vertigineuse du nombre de véhicules au Québec, cette baisse de consommation potentielle risque d’être complètement annulée. Entre 1998 et 2008, alors que la population du Québec augmentait de 6%, son parc de véhicules augmentait de 31%, soit 5 fois plus. Si la tendance se maintient, le parc de véhicules augmentera d’au moins 10% d’ici 2020, faisant en sorte que les émissions de CO2 du transport routier québécois n’auront finalement pas baissé d’un iota. Si nous considérons que l’actuel projet Turcot consacre la préséance du transport individuel pour les prochaines 40 années, nous faisons face à une impossibilité mathématique.

-20% en 2020? Vraiment?

Le Québec a un gros problème. Alors que le gouvernement a affirmé qu’il atteignait l’objectif de Kyoto, la réalité s’est avérée tout autre. Pourquoi? Principalement à cause du transport. Les émissions de CO2 en transport routier ont augmenté entre 1990 et 2007 de 35,78%. Pendant cette même période, les seuls secteurs à afficher une baisse des émissions sont Industrie, Déchets et Électricité dont les baisses sont respectivement de 6,25%, 31,65% et 69,18%. Les deux derniers secteurs représentent toutefois une faible part – moins de 7% – des émissions totales et n’ont donc pas d’effet significatif sur les résultats globaux. Suite à nos analyses, les secteurs autres que le transport ne pourront baisser de beaucoup plus leurs émissions de GES. Si nous sommes optimistes, disons qu’ils pourraient encore diminuer de 10% d’ici 2020.

Dans ce contexte, notre modélisation nous apprend que la diminution que devra afficher le secteur transport devra alors être de 41,8% en 2020. (voir notre étude au http://www.mcn21.org)

Conclusion

C’est mathématiquement implacable. Si le ministre Arcand veut être crédible dans son objectif pour le Québec de diminution de -20% en 2020, il doit appeler le ministre des Transports, M. Sam Hamad, afin que le projet Turcot soit revu de fond en comble afin de prioriser le transport collectif, autant que possible électrifié.

Monsieur Arcand, lequel votre gouvernement choisira-t-il? Le projet Turcot du MTQ ou -20% en 2020? C’est l’un ou l’autre, pas les deux.

Votre réponse ( ou absence de…) sera révélatrice.